Le “Centre”, notion universelle connue depuis les temps les plus archaïques quoique insuffisamment mise en lumière à notre époque, désigne traditionnellement le lieu, tangible ou symbolique, le plus chargé de Sacré, le point névralgique situé au « milieu de la terre », autour duquel chaque civilisation, chaque “monde” naît, se développe et meurt. Ainsi, tout lieu saint, qu’il ait la dimension d’un vaste territoire (pensons à la « Terre Sainte » palestinienne, à la Chine dénommée l’ « Empire du Milieu » ou encore à la Suisse appelée par ses habitants « milieu du monde »…), d’une ville (Jérusalem, “Centre” du Monde pour juifs et chrétiens ; La Mecque, “Centre” spirituel de la sphère musulmane ; Rome, “Centre” de l’Empire Romain ; la cité impériale pékinoise, “Centre” de l’ « Empire céleste » chinois), d’un édifice religieux ou d’un monument sacré (le Temple de Salomon, l’omphalos de Delphes, la Kaaba mecquoise, le Palladium de Troie, les pyramides gyptiennes ou aztèques…), ou la modeste taille d’une simple habitation individuelle ou d’un petit sanctuaire secondaire, était conçu comme une imago mundi et faisait office de “Centre” de gravité d’un espace qualifié à la circonférence bien définie, où les forces chaotiques étaient chassées à l’extérieur de l’enceinte périphérique ; dans la perspective analogique et concentrique qu’avaient les Anciens, le monde connu, l’oecoumène, se trouvait au “Centre” de l’univers, la capitale sainte au “Centre” de l’oecoumène, le temple au “Centre” de la cité, l’autel où brûle le feu perpétuel au “Centre” du bâtiment sacré… C’est bien au “Centre” que toutes les directions de l’espace se rejoignent ; c’est donc là que l’ « Axe du Monde » coupe le plan horizontal, permettant aux hommes une communication directe avec les dieux, situés dans les hauteurs éthérées du ciel, mais donnant aussi l’accès au monde souterrain, résidence des morts et du Chaos primordial pré-formel (par exemple, la cité de Jérusalem communique avec le haut et le bas, car elle est caractéristiquement surnommée la « Porte du Ciel » aussi bien que la « Bouche du Tehôm », de même que Babylone était la « Porte des Dieux » comme la « Porte d’Apsû »). Du reste, il faut bien voir que dans la vision du monde particulière aux civilisations traditionnelles, l’espace habité se devait d’imiter un modèle cosmologique, mythique ou religieux : le plan terrestre, physique, était constitué comme un reflet du plan céleste, métaphysique… Les centres cérémoniels érigés par les hommes au cours de l’histoire se sont toujours présentés comme des hypostases matérialisées du seul et unique “Centre” du Monde », immatériel, siège de la divinité réunissant en elle toutes les antinomies, c’est-àdire le « moteur immobile » ou l’ « Invariable Milieu », le moyeu de la roue cosmique qui est à l’origine et à la fin de toute manifestation. À travers les écrits saints, les cosmogonies des peuples primitifs, les récits mythologiques ou les contes et légendes véhiculés par l’imaginaire populaire, le “Centre” par excellence, le séjour des dieux et des immortels, assimilé à la fois à l’ “âge d’or ” primordial et au paradis post-mortem, a été revêtu d’une floraison de symboles typiques et immémoriaux (aux significations variées mais toujours complémentaires) qu’il convient de rendre intelligibles, tels que l’ “arbre de vie”, la “montagne cosmique”, le « nombril du monde », la “porte du ciel”, la “voie des dieux”, la “caverne aux trésors”, le “séjour des bienheureux”, l’ “île des saints”, la “terre pure”, la “fontaine d’immortalité”, le “pilier universel”, le “jardin clos”, la “cité céleste”, sans oublier les divers royaumes merveilleux et autres palais magiques. Par là-même cette étude permettra de constater l’incroyable gouffre qui sépare le “vivre-dans-le-monde” traditionnel, qualifié et centré, du vide existentiel du monde moderne crépusculaire, littéralement “désaxé” et “désorienté”. Enfin et surtout, il nous faudra insister sur le fait que tout retour au
“Centre” équivaut à une quête initiatique individuelle, à une réintégration ontologique intemporellement opérative, car n’oublions pas que « le Royaume de Dieu » se situe avant tout « en nous-mêmes ».
*********
Pierre-Yves Lenoble est né le 25 août 1981 à Dijon. Il est titulaire d´une Licence d´Histoire à l´Université de Bourgogne. Passionné depuis son plus jeune âge par le Moyen-âge, les spiritualités du monde entier et la mythologie comparée, il se veut autodidacte, préférant la liberté de penser et la création personnelle à toute compromission universitaire. Auteur traditionaliste apolitique, sa vision du monde et ses réflexions ont été influencées par le platonisme, la philosophie médiévale islamo-chrétienne et les penseurs de la Tradition (Guénon, Coomaraswamy, Evola, Eliade...). En humble continuateur, ses travaux, qui abordent le rôle anthropologique primordial joué par le Sacré, visent à montrer l´unicité métaphysique des diverses croyances et religions humaines, et, par là-même, à mettre en lumière la grave crise spirituelle et la décadence socio-historique traversées par notre monde contemporain. Il a écrit trois ouvrages publiés aux éditions Archè Milano : Métaphysique du Moyen-âge en 2014, Le symbolisme du Centre en 2016 et Homo mythologicus qui paraîtra dans le courant de l´année.
Le “Centre”, notion universelle connue depuis les temps les plus archaïques quoique insuffisamment mise en lumière à notre époque, désigne traditionnellement le lieu, tangible ou symbolique, le plus chargé de Sacré, le point névralgique situé au « milieu de la terre », autour duquel chaque civilisation, chaque “monde” naît, se développe et meurt. Ainsi, tout lieu saint, qu’il ait la dimension d’un vaste territoire (pensons à la « Terre Sainte » palestinienne, à la Chine dénommée l’ « Empire du Milieu » ou encore à la Suisse appelée par ses habitants « milieu du monde »…), d’une ville (Jérusalem, “Centre” du Monde pour juifs et chrétiens ; La Mecque, “Centre” spirituel de la sphère musulmane ; Rome, “Centre” de l’Empire Romain ; la cité impériale pékinoise, “Centre” de l’ « Empire céleste » chinois), d’un édifice religieux ou d’un monument sacré (le Temple de Salomon, l’omphalos de Delphes, la Kaaba mecquoise, le Palladium de Troie, les pyramides gyptiennes ou aztèques…), ou la modeste taille d’une simple habitation individuelle ou d’un petit sanctuaire secondaire, était conçu comme une imago mundi et faisait office de “Centre” de gravité d’un espace qualifié à la circonférence bien définie, où les forces chaotiques étaient chassées à l’extérieur de l’enceinte périphérique ; dans la perspective analogique et concentrique qu’avaient les Anciens, le monde connu, l’oecoumène, se trouvait au “Centre” de l’univers, la capitale sainte au “Centre” de l’oecoumène, le temple au “Centre” de la cité, l’autel où brûle le feu perpétuel au “Centre” du bâtiment sacré… C’est bien au “Centre” que toutes les directions de l’espace se rejoignent ; c’est donc là que l’ « Axe du Monde » coupe le plan horizontal, permettant aux hommes une communication directe avec les dieux, situés dans les hauteurs éthérées du ciel, mais donnant aussi l’accès au monde souterrain, résidence des morts et du Chaos primordial pré-formel (par exemple, la cité de Jérusalem communique avec le haut et le bas, car elle est caractéristiquement surnommée la « Porte du Ciel » aussi bien que la « Bouche du Tehôm », de même que Babylone était la « Porte des Dieux » comme la « Porte d’Apsû »). Du reste, il faut bien voir que dans la vision du monde particulière aux civilisations traditionnelles, l’espace habité se devait d’imiter un modèle cosmologique, mythique ou religieux : le plan terrestre, physique, était constitué comme un reflet du plan céleste, métaphysique… Les centres cérémoniels érigés par les hommes au cours de l’histoire se sont toujours présentés comme des hypostases matérialisées du seul et unique “Centre” du Monde », immatériel, siège de la divinité réunissant en elle toutes les antinomies, c’est-àdire le « moteur immobile » ou l’ « Invariable Milieu », le moyeu de la roue cosmique qui est à l’origine et à la fin de toute manifestation. À travers les écrits saints, les cosmogonies des peuples primitifs, les récits mythologiques ou les contes et légendes véhiculés par l’imaginaire populaire, le “Centre” par excellence, le séjour des dieux et des immortels, assimilé à la fois à l’ “âge d’or ” primordial et au paradis post-mortem, a été revêtu d’une floraison de symboles typiques et immémoriaux (aux significations variées mais toujours complémentaires) qu’il convient de rendre intelligibles, tels que l’ “arbre de vie”, la “montagne cosmique”, le « nombril du monde », la “porte du ciel”, la “voie des dieux”, la “caverne aux trésors”, le “séjour des bienheureux”, l’ “île des saints”, la “terre pure”, la “fontaine d’immortalité”, le “pilier universel”, le “jardin clos”, la “cité céleste”, sans oublier les divers royaumes merveilleux et autres palais magiques. Par là-même cette étude permettra de constater l’incroyable gouffre qui sépare le “vivre-dans-le-monde” traditionnel, qualifié et centré, du vide existentiel du monde moderne crépusculaire, littéralement “désaxé” et “désorienté”. Enfin et surtout, il nous faudra insister sur le fait que tout retour au
“Centre” équivaut à une quête initiatique individuelle, à une réintégration ontologique intemporellement opérative, car n’oublions pas que « le Royaume de Dieu » se situe avant tout « en nous-mêmes ».
*********
Pierre-Yves Lenoble est né le 25 août 1981 à Dijon. Il est titulaire d´une Licence d´Histoire à l´Université de Bourgogne. Passionné depuis son plus jeune âge par le Moyen-âge, les spiritualités du monde entier et la mythologie comparée, il se veut autodidacte, préférant la liberté de penser et la création personnelle à toute compromission universitaire. Auteur traditionaliste apolitique, sa vision du monde et ses réflexions ont été influencées par le platonisme, la philosophie médiévale islamo-chrétienne et les penseurs de la Tradition (Guénon, Coomaraswamy, Evola, Eliade...). En humble continuateur, ses travaux, qui abordent le rôle anthropologique primordial joué par le Sacré, visent à montrer l´unicité métaphysique des diverses croyances et religions humaines, et, par là-même, à mettre en lumière la grave crise spirituelle et la décadence socio-historique traversées par notre monde contemporain. Il a écrit trois ouvrages publiés aux éditions Archè Milano : Métaphysique du Moyen-âge en 2014, Le symbolisme du Centre en 2016 et Homo mythologicus qui paraîtra dans le courant de l´année.