Ce livre paraît après le triptyque intitulé La Représentation des corps et du ciel, composé de trois oratorios : Le grand silence (2011) ; Le temps ouvre les yeux (2013) et Présent absolu (2014), ce dernier suivi d’un essai, « Un art du peu ».
Ce que dit le Centaure s’inscrit dans la même recherche, qu’il pousse à de nouvelles limites. Marqué par la leçon de radicalité et de liberté du dadaïsme et de la mystique rhénane (les deux en fait profondément liés), Gérard Pfister poursuit à travers romans, essais et poésie une quête unique.
Le poète est un dompteur de mots. Car les mots sont des forces dangereuses qui, on le voit tous les jours, rendent aveugle, fou, meurtrier. On ne se méfie jamais assez de ces faux amis. Le poème est une catharsis pour nous libérer de leur illusion : « Si, depuis toujours et comme par nécessité, le langage est illusionniste et, prétendant nous faire accéder à la réalité, nous en éloigne au contraire pour nous reclore dans un monde de fiction, l’homme n’a d’autre recours que de tenter une parole qui se donne elle-même pour représentation afin que, le rideau du théâtre levé, sous la lumière impitoyable du mythe se révèle le drame de ces forces désirantes que le langage toujours appelle, toujours égare, toujours déçoit. »
À quoi bon la poésie aujourd’hui ? Pour nous libérer – par un retournement comparable à « l’effet de distanciation » décrit par Brecht – de l’aliénation et de la servitude qu’impose un langage de plus en plus réduit à une pseudo-communication : « La parole se doit de ne pas rester dupe ni complice de ses propres prestiges mais, les ayant enfin percés à jour et asservis à son désir, de s’assumer comme représentation et révélation de sa propre fiction. C’est à ce prix seulement que la poésie, débarrassée de ses oripeaux et ses grimaces de vieille magicienne, peut être digne enfin de la raison humaine, non plus aliénante et infantilisante, mais éclairante et libératrice. »
L’enjeu, c’est notre dignité d’homme, notre liberté : « Sur la scène, ce ne sont que des mots et ce qu’ils jouent, ce n’est que leur histoire. Et notre joie est dans cette représentation et cette révélation qui nous libèrent de l’illusion du langage. » Le titre de la préface, « Un théâtre de mots », résume l’ambition dramaturgique de cette poésie dont l’espace intègre naturellement musique et peinture. Dans ce « mythe en musique » (terme emprunté à L’Orfeo de Monteverdi), les forces de la parole se personnifient, se déchirent, se défient pour qu’enfin triomphe le chant.
Ce livre paraît après le triptyque intitulé La Représentation des corps et du ciel, composé de trois oratorios : Le grand silence (2011) ; Le temps ouvre les yeux (2013) et Présent absolu (2014), ce dernier suivi d’un essai, « Un art du peu ».
Ce que dit le Centaure s’inscrit dans la même recherche, qu’il pousse à de nouvelles limites. Marqué par la leçon de radicalité et de liberté du dadaïsme et de la mystique rhénane (les deux en fait profondément liés), Gérard Pfister poursuit à travers romans, essais et poésie une quête unique.
Le poète est un dompteur de mots. Car les mots sont des forces dangereuses qui, on le voit tous les jours, rendent aveugle, fou, meurtrier. On ne se méfie jamais assez de ces faux amis. Le poème est une catharsis pour nous libérer de leur illusion : « Si, depuis toujours et comme par nécessité, le langage est illusionniste et, prétendant nous faire accéder à la réalité, nous en éloigne au contraire pour nous reclore dans un monde de fiction, l’homme n’a d’autre recours que de tenter une parole qui se donne elle-même pour représentation afin que, le rideau du théâtre levé, sous la lumière impitoyable du mythe se révèle le drame de ces forces désirantes que le langage toujours appelle, toujours égare, toujours déçoit. »
À quoi bon la poésie aujourd’hui ? Pour nous libérer – par un retournement comparable à « l’effet de distanciation » décrit par Brecht – de l’aliénation et de la servitude qu’impose un langage de plus en plus réduit à une pseudo-communication : « La parole se doit de ne pas rester dupe ni complice de ses propres prestiges mais, les ayant enfin percés à jour et asservis à son désir, de s’assumer comme représentation et révélation de sa propre fiction. C’est à ce prix seulement que la poésie, débarrassée de ses oripeaux et ses grimaces de vieille magicienne, peut être digne enfin de la raison humaine, non plus aliénante et infantilisante, mais éclairante et libératrice. »
L’enjeu, c’est notre dignité d’homme, notre liberté : « Sur la scène, ce ne sont que des mots et ce qu’ils jouent, ce n’est que leur histoire. Et notre joie est dans cette représentation et cette révélation qui nous libèrent de l’illusion du langage. » Le titre de la préface, « Un théâtre de mots », résume l’ambition dramaturgique de cette poésie dont l’espace intègre naturellement musique et peinture. Dans ce « mythe en musique » (terme emprunté à L’Orfeo de Monteverdi), les forces de la parole se personnifient, se déchirent, se défient pour qu’enfin triomphe le chant.